D'abord annoncée en novembre dernier, la sortie de E=MC², son 11° album, a été repoussée jusqu'a cette semaine. L'ex-“Cendrillon de l'Amérique” a ainsi eu tout le temps de retrouver son punch, sa voix et son aura; “Touch My Body,” premier single tiré du disque, est déjà en tête des charts aux Etats-Unis. Dix ans après avoir divorcé de Tommy Mottola, le patron de Sony, la chanteuse aux cinq octaves a enfin vaincu ses démons. La mort de son pére en 2001 ai traumatisante qu'elle ait pu être, lui a permis de se réconcilier avec son passée, mais aussi de renouer avec la foi naïve et vivifiante de son enfance. Plus sexy que jamais, elle a significativement minci de 17 kilos en quelques mois. Et si elle a déjà vendu plus de 165 millions d'albums en dix-huis années de carrière, ce n'est, pour elle, qu'un début: à 38 ans, elle retrouve l'abattage de ses débuts.
Comme Barack Obama, vous êtes née d'un couple mixte. Avez-vous comme lui éprouvé des difficultés à trouver votre identité?
Quand j'étais petite, je n'aurais jamais imaginé qu'on puisse avoir un candidat métis à la présidence des Etats Unis. Ce qui est en train de se passer est énorme pour notre pays. Dans ma jeunesse, je me sentais exclue. J'avais le défaut de n'appartenir à aucune identité en particulier. J'avais l'impression de ne jamais être chez moi nulle part. Mes parents ont divorcé quand j'avais 3 ans. Je ne peux pas dire que j'ai eu à subir autant le racisme que mes frères et sœurs plus âgés. J'étais la plus jeune et c'était moins difficile. La société était plus tolérante. Mais au fond de moi, je ressentais toujours cette exclusion. Je ne voulais pas en parler a mes parents qui travessaient une crise. Je ne voulais pas les embarrasser avec mes problèmes, même s'ils étaient très réels pour mou. Tous les métis que je rencontre peuvent vous raconter la même histoire. Nous portons sur nous une ambiguïté. A moins de grandir dans un environnement rempli de gens comme nous, affronter le regard extérieur est parfois difficile.
La musique a-t-elle répondu à votre quête d'identité?
Infiniment. La musique a remplí un vide immense dans ma vie. J'ai chanté dès que j'ai commencé a parler. Ensuite j'ai appris à siffler. C'est mon père qui m'a expliqué comment il fallait s'y prendre. [Elle siffle la bande originale du Parrain et s'excuse de sa prestation…] Ma mère était cantatrice. Elle m'a appris le chant. La religion aussi fut une étape énorme.
Dieu a-t-il une grande importance dans votre vie?
Je n'ai jamais douté de son existence, même si je n'ai pas toujours prié. Je garde en moi l'image de la petite fille extrêmement positive que j'étais jadis, avec cette relation pure et innocente a Dieu. J'y reviens tout le temps. J'avais un don pour la musique et il venait de Dieu. Quelles que furent les épreuves que j'ai eues à affronter enfant, la foi m'a toujours aidée à aller de l'avant. Ensuite, à chaque fois que j'ai eu des périodes sombres, je suis revenue vers la petite fille. En un sens, j'aurais 12 ans pendant ma vie entière.
Vous pensez que, d'une gamine mal dans sa peau à la chanteuse qui a vendu la plus de disques dans l'histoire de la musique, vous n'avez pas changé?
Effectivement, je n'ai pas vraiment changé. Ça paraît idiot, mais je crois que tout ce qui m'est arrive a existé pour une raison précise. C'est ce que je ressens dans ma relation à Dieu quand je prie. Je suis en harmonie avec moi-même en me plongeant dans la Bible. Je l'ai lue trois fois et je crois que toutes les petites choses qui y sont décrites m'aident à être une personne meilleure, comme toute l'expérience que je retire de la vie.
2001 a été una année difficile avec la disparition de votre père…
Très difficile. Sa maladie, surtout. Il est resté parmi nous plus longtemps qu'on ne pouvait l'espérer, mais ce fut très dur. J'ai vraiment appris à le connaître. Sur la toute fin de sa vie, il m'a dit: “Tu n'avais pas besoin de devenir une star pour que je t'aime. Pour moi, dans mon cœur, tu as toujours été une star.” C'était étrange d'entendre ses paroles, car je n'avais jamais ressenti un tel amour avant. C'était comme un retour au sources. J'avais atteint l'apogée de ma carrière et je revenais tout d'un coup au début. Por mon père, hélas, c'était la fin. Je suis ressortie plus forte de cette é preuve. J'étais revenue à l'essence de mon être, à la petite fille. [Rires]
Regrettez-vous certains choix au cours de votre carrière?
Bien sûr. Comment ne pas regretter le fim Glitter? Je ne crois cependant pas que ce fut la pire chose qui ait été produite sur terre, comme on a pu l'écrire. Il faut pourtant l'avouer, le film n'avait aucun scénario. Et puis le choix du 11 septembre 2001 pour la sortie n'était pas exactement le plus judicieux, n'est-ce pas? [Rires] En tant qu'artiste et être humain, j'ai appris beaucoup de cet échec cuisant. Je l'ai très mal vécu, mais mon optimisme a fini par reprendre le dessus. Il y a eu depuis pas mal de chanteuses dont les films n'étaient pas to us des réussites! [Rires]
En épousant Tommy Mottola, le patron de Sony, vous n'étiez pas seulement mariée à un homme mais aussi à una maison de disques. Etait-ce uns erreur?
Oui, c'en était évidemment une. Il m'aimait, mais à un point tel que cela en devenait obsessionnel. Aujourd'hui, je veux croire qu'il n'avait pas réellement de mauvaises intentions. Mais la relation était abusive, et quiconque a été dans une relation abusive doit le dire. Moi, je le dis à travers mes chansons. &ldquoSide Effects,” dans mon dernier album E=MC², évoque cela. Il faut en parler, c'est important. A l'époque où j'étais avec lui, tout le monde croyait que je vivais un conte de fées. Je vivais dans l'image de moi-même à travers la télévision. Et dans le fond, je n'aimais mème pas cette image. J'étais condamnée à être heureuse. Si c'était à refaire, je ne l'aurais pas épousé.
L'image de Mariah Carey, telle que votre maison de disques la voulait, vous a-t-elle empêchée d'explorer d'autres univers musicaux? Aviez-vous l'impression de n'être qu'un produit?
Oui, c'est ce qui s'est passé. Ma base, c'était le R'n'B. Mon label voulait me pousser vers la pop. Mais que veut dire la pop? C'est large et, à bien y réfléchir, ça ne veut rien dire. Tout ça n'est qu'une question d'image. Ceux qui m'encadraient avaient une idée précise de ce qu'ils voulaient me faire chanter. Difficile d'innover dans ce contexte!
Vous dites que vous ne prenez jamais de décisions basées sur l'argent.
Je disais cela jusqu'à ce qu'il m'arrive de prendre des décisions en pensant à l'argent. [Rires] Ce que je veux dire par là, c'est que j'ai grandi sans argent. Puis, un jour, d'un seul coup, j'en ai eu beaucoup. Et à partir de ce moment-là, il n'a pas toujours été facile de raisonner sans ce paramètre. Quand j'étais jeune, il m'arrivait de ne prendre qu'un repas par jour parce que nous n'avions véritablement rien à manger. Je n'avais pas de problème pour garder la ligne! Maintenant non plus d'ailleurs… Je rentre dans les jeans que je portais quand j'avais 17 ans, mais je dois faire beaucoup d'efforts pour ça, toutes sortes d'exercices. J'ai dû adopter une façon de manger très française. Ma diététicienne s'appelle Patricia et vient de Bordeaux.
Venez-ous souvent en France?
Ça m'arrive. Je garde d'ailleurs un souvenir précis de mon premier séjour à Paris en 1991, je crois. J'étais dans ma loge avant de faire une interview pour la télévision. Je me maquillais et refaisais les boucles de mes cheveux à l'aide d'un fer. Ce dont je ne m'étais pas rendu compte, c'est qu'il m'aurait fallu un adaptateur. Au bout d'un moment, le fer est devenu très chaud et mes cheveux ont commencé à brûler. J'ai dû en couper une partie, heureusement pas la frange. J'étais terrifiée. A l'époque, peu de gens me connaissaient en dehors des Etats-Unis. Quelle impression allais-je laisser? Finalement, tout s'est bien passé. Cette mésaventure ne m'a pas empêchée de rencontrer en France les meilleurs coiffeurs et maquilleurs du monde, et de continuer à travailler avec eux aujourd'hui.