“Les Chiens Sont Plus Fidèles Que Les Hommes!”

Miraculée après sa tentative de suicide, la diva renoue enfin avec le succès. Sauf dans sa vie privée.

Ciné-Télé-Revue (FR) September 23, 2005. Text by Ingrid Fallay.

Grosse effervescence à la Star Academy la semaine dernière: marraine allait arriver. Non pas cette vieille tante qui réussit à merveille la tarte aux pommes, mais une diva à la voix d'or. Un petit bout de femme sensuel à la peau dorée. Une séductrice, assurément. Les academyciens se seraient battus pour partager son micro. Un privilège finalement accordé à Emilie et à Jean-Luc. Ces deux-là ont bossé dur pour que leur interprétation de “Hero,” avec Mariah Carey, soit parfaite. Et elle l'était: même la très diffiCile Raphaelle Ricci a succombé.

Le lendemain, au traditionnel debriefing, la prof a parlé de “pur moment de grâce.” En revanche, Rafi n'est toujours pas convaincue par Jill, la candidate belge du château. Elle ne la trouve pas assez naturelle. Heureusement, les autres professeurs ont constaté d'énormes progrès. Du coup, la Bruxelloise s'est hissée à la cinquième place du classement des élèves. Gageons que lors du prochain prime, elle aura plus d'armes pour se défendre. Un duo avec une star, par exemple. Un bonheur qui lui a été jusqu'ici refusé. Et qui l'a amenée à crier au favoritisme. Mais Jill aura au moins appris ceci: on n'a rien sans rien. Et si, dans ses rares moments de temps libre, elle se penchait sur le parcours de la divine Mariah Carey, elle n'en serait que plus persuadée.

Avec ses 165 millions de disques écoulés, Mariah est “the biggest selling female in the world” (comprenez celle qui vend le plus au monde). Mais la serveuse de bar qu'elle était a connu la galère avant le succès. Et quand celui-ci a culminé, le papillon, auquel elle aime se comparer, s'est brûlé les ailes. “Je ne mangeais plus, j'étais insomniaque, mais personne ne me demandait comment j'allais. J'étais devenue une machine à vendre des disques, une créature conçue pour la scène.”

Dépression. Tentative de suicide. Thérapie. 2001 est une année maudite pour la chanteuse. Affranchie de ses démons, elle a aujourd'hui décidé de s'amuser. Son nouvel album, au titre éloquent de The emancipation of Mimi (Mimi, c'est le petit nom que lui donnent ses proches), marque un tournant dans sa vie. Mariah jouait gros. Elle peut respirer: 5,2 millions d'exemplaires se sont déjà vendus et deux singles (“Shake it off” et “We belong together” figurent actuellement dans le top 5 du billboard américain. Banco.

“Pour la première fois de ma carrière, j'ai pris un réel plaisir à faire un album. Enfin, je me sens libre.” Après trois ans d'absence, la diva refait surface. Oh, elle avait bien amorcé son retour, en 2002, avec Charmbracelet, qu'elle avait financé en créant sa propre société, MonarC', mais c'était trop tôt. Mariah devait se reconstruire.

Un an auparavant en effet, la chanteuse avait craqué. Le 25 juillet 2001, elle avait été internée dans l'unité psychiatrique d'un hôpital new-yorkais. Officiellement, pour se reposer. Officieusement, parce qu'elle s'était tailladé les veines. Sa rupture d'avec Luis Miguel, le crooner mexicain qui lui avait offert un bracelet d'une valeur de 1,5 million d'euros, et l'échec de son album Glitter et du film du même nom l'avaient détruite. La dépression guettait. “J'ignore vers quelle catastrophe je me précipite,” avait-elle fait savoir via son site Internet. “Je dois m'arrêter momentanément. La seule chose que je désire, c'est avoir au moins une nuit de sommeil.”

Mariah a présumé de ses forces. Libérée de Tommy Mottola, le tout-puissant Pdg de Sony, qui l'avait façonnée… et épousée en 1993, elle s'était donnée sans compter pour prouver au monde qu'elle pouvait exister sans lui. Une nouvelle femme était née. Emancipée. Tommy était plutôt le genre de mari à lui faire porter des cols roués, elle avait osé la minijupe. La machine à succès s'était emballée. Puis enrayée. “Je venais de recevoir le plus gros chèque jamais signé pour un contrat de trois albums (elle avait quitté Sony pour Virgin) et je ne m'octroyais pas le droit de décevoir.”

Ne pas décevoir… le leitmotiv de toute une vie, la racine de tous ses maux. Née d'un père ingénieur afro-vénézuélien et d'une chanteuse d'opéra americano-irlandaise, Mariah Carey a longtemps souffert du racisme: “Ma mère avait été bannie par sa famille uniquement pour avoir épousé un Noir,” explique-t-elle. “Mes parents ont divorcé quand j'avais 3 ans. Dès cet instant, j'ai ressenti d'énormes difficultés à assumer mon identité mixte. J'étais trop blanche pour être considérée par les Noirs et trop noire pour les Blancs. Il fallait que je bosse trois fois plus pour me faire reconnaître. J'ai donc toujours travaillé jusqu'à la rupture. Toute petite, j'ai pensé qu'il devait y avoir un problème avec moi. Et pour qu'il n'y en ait pas, tout devait être parfait. Je m'obligeais à être la plus agréable, la plus disponible… Je me suis oubliée.”

Début juillet 2001 encore, dans l'une de ses dernières interviews avant son hospitalisation, elle se sentait vulnérable. Outre un problème d'identité récurrent, elle se débattait avec des souvenirs d'enfance douloureux: un père absent qui ne la comprenait pas, un frère handicapé, une sœur prostituée et junkie, une mère qui a toujours vu grand pour sa fille… “A 5 ans, dans la caisse pourrie de ma mère, sur un parking de supermarche, je me suis dit, en voyant les gens riches: ‘Un jour, je serai une star’.” La gloire coûte cher. Elle l'a appris à ses dépens.

Aujourd'hui, Mariah Carey a retrouvé le feu sacré. Elle prépare une tournée, une sitcom et des contes pour enfants. “Je ne regrette rien,” confie-t-elle, “parce que le monde entier a dû réaliser ma faiblesse, comprendre qu'il fallait me voir comme un être humain avec toute sa fragilité, ses doutes et son imperfection.” Elle voit la vie autrement aussi. Peu après avoir traversé ces terribles épreuves (entre-temps, Virgin l'a licenciée et le métier la disait finie), elle s'est réconciliée avec son père. “Il y a eu trop de malentendus entre nous. J'avais oublié de lui dire que je l'aimais.” Elle s'est même employée à dresser l'arbre généalogique de sa famille. Et, ainsi, de se découvrir une arrière-arrière-arrière-grand-mère esclave. “Ma mère, très blanche, est une Irlandaise du Middle West Après en avoir souffert, je suis fière de ce métis sage.” Sa rencontre avec Derek Jeter a également été déterminante. Comme elle, il a un père noir et une mère blanche. “Quand je les ai vus tous ensemble, j'ai repris espoir. J'ai réalisé que tous mes problèmes venaient vraiment de mes origines. La famille de Derek était formidable, unie. Je n'avais jamais vu cela avant.”

Leur romance tournera court. Il y en aura d'autres, tout aussi éphémères, avec Eminem, notamment, qui lui a joué un tour de cochon en diffusant dans ses concerts les messages vocaux larmoyants de la star, qui avait appris qu'il était retourné avec son ex-femme. Depuis, Mariah serait amoureuse d'un cinéaste. Mais elle se veut discrète à son sujet. “Si j'en parle, j'ai l'impression que cela dévalorise mes sentiments. D'autant qu'avec mon emploi du temps, mes rares histoires d'amour y perdent en spontanéité. Bien sûr, j'aimerais garder un homme à mes côtés, mais je ne suis pas obsédée par les relations sexuelles. Je préfère me concentrer sur des choses plus importantes.” Faire enlever toutes les ampoules de sa suite d'hôtel pour les remplacer par des lampes roses qui lui vont mieux au teint, par exemple. Ou encore engager une assistante uniquement préposée à garder son chewing-gum entre deux chansons! Voyons, parmi ces choses plus importantes il y a encore son refus de descendre de voiture tant qu'un tapis rouge, recouvert de bougies de 60 cm de haut, n'a pas été déroulé à l'entrée du palace londonien où elle a réservé quinze chambres. Ou cette exigence au réveil: la personne chargée de cette douce mission doit impérativement prononcer: “Bonjour, Mademoiselle Carey, vous êtes rayonnante ce matin.” Autre caprice, faire venir Jack, son toutou, en première classe, de Los Angeles à New York, parce qu'elle se sent seule sans lui. Après tout: “Les chiens sont plus fidèles que les hommes!” Ouaf!